C’est l’écocide qui est punitif. Pas l’écologie.

Paul Blume

Avec la campagne électorale pour le scrutin de ce 9 juin, revient le mantra « Non à l’écologie punitive ».

Cela colle au ressenti de groupes sociaux divers, c’est repris en chœur, en mode bashing des politiques dites vertes.

Or, s’il est une critique à adresser aux participations des écologistes à la législature qui se termine, c’est bien l’inverse.

Ce n’est pas d’avoir proposé des mesures encore très insuffisantes au regard de la réalité des niveaux de préhension et de pollution qui est critiquable, mais d’avoir édulcoré les exigences environnementales et climatiques.

La faute ne réside pas dans le fait d’avoir promu des législations jugées inconfortables pour la croissance économique et les écarts sociaux, mais d’avoir promu la possibilité d’une croissance vertueuse adaptable aux contraintes liées à la dégradation de plus en plus rapide des conditions de la vie sur terre.

Continuer, dans le chef des partis écologistes, de prétendre à la possibilité d’une croissance verte est non seulement contre-productif politiquement, mensongé sur le plan scientifique, mais aussi extrêmement nuisible pour l’humanité.

L’enjeu est la prise de conscience de la dystopie que nous sommes en train de vivre.

Pour mesurer l’énormité des efforts à réaliser pour permettre aux générations futures de tout simplement vivre, on peut s’appuyer – par exemple – sur les calculs des efforts proposés pour empêcher le réchauffement climatique de dépasser une limite « acceptable ».

A la sortie des accords de Paris de 2015, on évaluait l’effort de la décroissance nécessaire du recours aux énergies fossiles à minimum 2 % sur base annuelle.

Ce qui signifiait déjà d’imposer une trajectoire exponentielle négative à l’ensemble des activités économiques plus ou moins corrélées aux émissions de gaz à effet de serre.

Pour en faire une description simpliste, cela impliquait une réduction immédiate de l’usage des charbon, gaz et pétrole quels qu’en soient les usages. De l’extraction de matières premières aux transports en passant par les régulations calorifiques, l’agriculture ou le refroidissement de centres de données numériques.

En reprenant ces objectifs climatiques, on comprend vite le lien qu’il y a entre le fonctionnement de notre système économique, les quantités d’énergies et de ressources requises, les taux des pollutions diverses d’un côté, et l’évolution de la croissance (PIB) de l’autre.

Dans les milieux favorables à la priorisation de la croissance économique, on évoque, propose, affirme qu’il est possible de sortir de cette équation mortifère entre activités humaines et les taux de pollutions, l’effondrement de la biodiversité, l’explosion des risques climatiques, etc.

Mais, le réel n’a que faire de ces illusions.

Aujourd’hui, pour rester dans l’objectif d’un taux net zéro d’émissions des gaz à effet de serre en 2050, et compte tenu de la faiblesse des efforts réalisés depuis 2015, ceux-ci sont actuellement évalués à bien plus de 5 % (pour simplifier l’exemple).

Soit, pour reprendre la description simpliste précédente, une exigence de diminuer de minimum 1 unité sur 20 chaque année l’usage des charbon, gaz ou pétrole.

Soit, une diminution d’autant du recours aux énergies fossiles pour toute activité liée à leurs usages. Travail, loisir, santé, déplacements, tous les aspects de nos vies sont concernés.

Que cette exigence ne soit pas compatible avec nos souhaits d’équité sociale, d’investissement dans la santé ou nos envies de vacances n’y change strictement rien.

Hurler contre un mur parce qu’il est un mur est inutile.

L’adaptation aux limites planétaires, aux limites constatées scientifiquement à l’expansion des activités humaines n’a rien d’un choix. C’est un impératif incontournable. Qui nous sera de toute façon imposé.

Ce qui devrait occuper les politiques et les opinions publiques, c’est comment amortir les chocs en cours. Comment assurer une répartition équitable des efforts de sobriété.

Préservons ce qui peut l’être en vue d’une stabilisation des conditions de vie au moins bas possible.

Arrêtons de sacrifier des ressources à des usages non-essentiels. Ressources qui pourraient bien s’avérer vitales dans un avenir proche pour des usages existentiels.

Un exemple ? L’eau.

Celle qui, quand elle est potable, nous est indispensable. Mais aussi plus généralement le cycle de l’eau. Les quelques mois qui viennent de passer montrent comment et combien les perturbations du cycle de l’eau pourraient peser sur l’alimentation mondiale.

Les écolos ne sont pas critiquables d’avoir voulu être punitifs.

Mais bien coupables d’avoir voulu, en conscience, privilégié l’optimisme, le positivisme, la croissance plutôt que la promotion de politiques adaptées aux urgences documentées par la science.


https://obsant.eu/blog/2024/05/14/terrifies-mais-determines/

Terrifiés mais déterminés

Nous avons demandé à 380 climatologues de renom ce qu’ils pensaient de l’avenir…

Ils sont terrifiés, mais déterminés à continuer à se battre.
Damian Carrington

Traduction deepl Josette – article original sur The Guardian

Exclusif : Une enquête menée auprès de centaines d’experts révèle une image terrifiante de l’avenir, mais ils préviennent que la lutte contre le changement climatique ne doit pas être abandonnée.

Désespérés et brisés : voici pourquoi les plus grands climatologues du monde sont désespérés

« Parfois, il est presque impossible de ne pas se sentir désespéré et brisé », déclare la climatologue Ruth Cerezo-Mota. « Après les inondations, les incendies et les sécheresses de ces trois dernières années dans le monde entier, tous liés au changement climatique, et après la fureur de l’ouragan Otis au Mexique, mon pays, je pensais vraiment que les gouvernements étaient prêts à écouter la science et à agir dans l’intérêt de la population. »

Au lieu de cela, Mme Cerezo-Mota s’attend à ce que la planète se réchauffe de manière catastrophique de 3 °C au cours de ce siècle, dépassant ainsi l’objectif de 1,5 °C convenu au niveau international et causant d’énormes souffrances à des milliards de personnes. C’est son point de vue optimiste, dit-elle.

« Le point de rupture pour moi a été une réunion à Singapour », explique Mme Cerezo-Mota, experte en modélisation climatique à l’université nationale autonome du Mexique. Elle y a écouté d’autres experts expliquer le lien entre l’augmentation des températures mondiales et les vagues de chaleur, les incendies, les tempêtes et les inondations qui touchent les populations – non pas à la fin du siècle, mais aujourd’hui. « C’est à ce moment-là que tout s’est enclenché ».

« J’ai fait une dépression », dit-elle. « C’était une période très sombre de ma vie. J’étais incapable de faire quoi que ce soit et je ne faisais que survivre. »

Mme Cerezo-Mota s’est rétablie pour poursuivre son travail : « Nous continuons à le faire parce que nous devons le faire, de sorte que [les puissants] ne peuvent pas dire qu’ils ne savaient pas. Nous savons de quoi nous parlons. Ils peuvent dire qu’ils s’en fichent, mais ils ne peuvent pas dire qu’ils ne savaient pas. »

À Mérida, dans la péninsule du Yucatán, où vit Mme Cerezo-Mota, la chaleur s’intensifie. « L’été dernier, nous avons eu des températures maximales de 47°C. Le pire, c’est que même la nuit, il fait 38 °C, ce qui est supérieur à la température du corps. Le corps n’a donc pas une minute dans la journée pour essayer de récupérer. »

Selon elle, les vagues de chaleur record ont entraîné de nombreux décès au Mexique. « C’est très frustrant parce que beaucoup de ces choses auraient pu être évitées. Et il est tout simplement stupide de penser : « Je me fiche que le Mexique soit détruit ». Nous avons vu ces événements extrêmes se produire partout. Il n’y a pas d’endroit sûr pour qui que ce soit.

« Je pense que 3°C, c’est faire preuve d’espoir et de prudence. Le chiffre de 1,5 °C est déjà mauvais, mais je ne pense pas qu’il soit possible de s’en tenir à cela. Aucun gouvernement n’a clairement indiqué que nous allions rester en deçà de 1,5 °C. »

« Exaspérant, affligeant, accablant »

Mme Cerezo-Mota est loin d’être la seule à avoir peur. Une enquête exclusive menée par le Guardian auprès de centaines d’experts mondiaux du climat a révélé que

  • – 77 % des personnes interrogées pensent que les températures mondiales atteindront au moins 2,5 °C au-dessus des niveaux préindustriels, ce qui représente un degré de réchauffement dévastateur ;
  • – près de la moitié – 42 % – pensent qu’elles dépasseront les 3 °C ;
  • – 6 % seulement pensent que la limite de 1,5 °C sera atteinte.

La tâche à laquelle se sont attelés les chercheurs en climatologie est de brosser un tableau des mondes possibles à venir. Qu’il s’agisse d’experts de l’atmosphère et des océans, de l’énergie et de l’agriculture, de l’économie et de la politique, l’humeur de la quasi-totalité des personnes interrogées par le Guardian était sombre. Et l’avenir que nombre d’entre eux ont dépeint était déchirant : famines, migrations massives, conflits. « Je trouve cela exaspérant, angoissant, accablant », a déclaré un expert qui a préféré garder l’anonymat. « Je suis soulagé de ne pas avoir d’enfants, sachant ce que l’avenir nous réserve », a déclaré un autre.

Les réponses des scientifiques à l’enquête fournissent des avis éclairés sur des questions cruciales pour l’avenir de l’humanité. À quel point le monde va-t-il se réchauffer, et à quoi cela ressemblera-t-il ? Pourquoi le monde n’agit-il pas avec l’urgence nécessaire ? Les jeux sont-ils faits ou devons-nous continuer à nous battre ? Ils donnent également un rare aperçu de ce que c’est que de vivre avec ces connaissances au quotidien.

La crise climatique cause déjà de graves dommages, puisque la température moyenne de la planète a dépassé d’environ 1,2 °C la moyenne préindustrielle au cours des quatre dernières années. Mais l’ampleur des conséquences futures dépendra de ce qui se passera – ou non – dans les domaines de la politique, de la finance, de la technologie et de la société mondiale, et de la manière dont le climat et les écosystèmes de la Terre réagiront.

Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a réuni des milliers d’experts dans tous ces domaines pour produire les rapports les plus fiables qui soient, approuvés par tous les gouvernements. Il a été créé en 1988 par les Nations Unies, qui craignaient déjà à l’époque que le réchauffement de la planète ne soit « désastreux pour l’humanité si des mesures ne sont pas prises à temps à tous les niveaux ».

Le GIEC avait pour mission de dresser un bilan complet et de formuler des recommandations, ce qu’il a fait à six reprises en 35 ans. En termes d’échelle et d’importance, il s’agit peut-être de l’entreprise scientifique la plus importante de l’histoire de l’humanité.

Les experts du GIEC sont, en bref, les personnes les mieux informées de la planète sur le climat. Ce qu’ils pensent est important. Le Guardian a donc contacté tous les auteurs principaux ou rédacteurs en chef de tous les rapports du GIEC depuis 2018. Près de la moitié ont répondu – 380 sur 843, un taux de réponse très élevé.

Leurs attentes en matière d’augmentation de la température mondiale sont très claires. Lisa Schipper, de l’université de Bonn, prévoit une hausse de 3 °C : « Cela semble vraiment sombre, mais je pense que c’est réaliste. Le problème, c’est que nous ne prenons pas les mesures qui s’imposent ». Techniquement, un pic de température plus bas est possible, ont déclaré les scientifiques, mais peu d’entre eux sont convaincus qu’il sera atteint.

Leurs sentiments dominants sont la peur et la frustration. « Je m’attends à un avenir semi-dystopique avec beaucoup de douleur et de souffrance pour les populations du Sud », a déclaré un scientifique sud-africain qui a préféré garder l’anonymat. « La réaction du monde à ce jour est répréhensible – nous vivons à l’ère des imbéciles. »

« Il est impossible de fuir »

Comment les scientifiques font-ils face au fait que leurs travaux ont été ignorés pendant des décennies et qu’ils vivent dans un monde qui, selon leurs conclusions, est sur une « autoroute de l’enfer » ?

Camille Parmesan, du centre d’écologie du CNRS en France, était sur le point d’abandonner il y a 15 ans. « J’avais consacré ma vie de chercheuse à [la science du climat] et cela n’avait pas changé grand-chose », explique-t-elle. J’ai commencé à me dire : « J’adore chanter, je vais peut-être devenir chanteuse de boîte de nuit ».

Ce qui l’a poussée à continuer, c’est le dévouement qu’elle a constaté chez les jeunes militants lors du turbulent sommet des Nations Unies sur le climat qui s’est tenu à Copenhague en 2009. « Tous ces jeunes gens étaient tellement enthousiastes, tellement passionnés. Alors j’ai dit que je continuerais à faire ça, pas pour les politiciens, mais pour vous ».

« La grande différence [avec le dernier rapport du GIEC], c’est que tous les scientifiques avec lesquels j’ai travaillé étaient incroyablement frustrés. Tout le monde était au bout du rouleau et se demandait ce qu’il fallait faire pour faire comprendre aux gens à quel point la situation était grave. »

« Les scientifiques sont des êtres humains : nous sommes aussi des habitants de la Terre, qui subissent les effets du changement climatique, qui ont des enfants et qui s’inquiètent de l’avenir », a déclaré Lisa Schipper. « Nous avons fait notre travail scientifique, nous avons rédigé ce très bon rapport et – waouw – cela n’a pas fait de différence au niveau de la politique. Il est très difficile de constater cela, à chaque fois. »

Le changement climatique est notre « réalité incontournable », a déclaré Joeri Rogelj, de l’Imperial College de Londres. « Il est impossible de le fuir et cela ne fera qu’accroître les difficultés à gérer les conséquences et à mettre en œuvre des solutions. »

Henri Waisman, de l’ Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI) en France, a déclaré : « Je suis régulièrement confronté à des moments de désespoir et de culpabilité de ne pas avoir réussi à faire évoluer les choses plus rapidement, et ces sentiments sont encore plus forts depuis que je suis devenu père. Mais, dans ces moments-là, deux choses m’aident : me souvenir des progrès accomplis depuis que j’ai commencé à travailler sur le sujet en 2005 et me rappeler que chaque dixième de degré compte beaucoup – ce qui signifie qu’il est toujours utile de poursuivre le combat. »

« 1,5 °C est un jeu politique »

Dans la crise climatique, même les fractions de degré ont de l’importance : chaque dixième supplémentaire signifie 140 millions de personnes de plus souffrant d’une chaleur dangereuse. L’objectif de 1,5 °C a été imposé dans les négociations internationales par une alliance de petits États insulaires particulièrement vulnérables. Pour eux, l’objectif précédent de 2 °C condamnait leurs nations à l’anéantissement sous l’effet de la montée des océans et des tempêtes.

L’objectif de 1,5 °C a été adopté en tant qu’objectif intermédiaire lors du sommet des Nations Unies sur le climat qui s’est tenu à Paris en 2015, l’accord étant considéré comme un triomphe, une déclaration d’une véritable ambition multilatérale délivrée avec des sourires radieux et des applaudissements euphoriques. Il est rapidement devenu l’objectif par défaut pour minimiser les dommages climatiques, les sommets de l’ONU se déroulant au son du refrain répété de : « Gardez 1,5 en vie ! » Pour que l’objectif soit dépassé, il faut que les températures mondiales soient supérieures à 1,5 °C pendant plusieurs années, et pas seulement pendant une année.

Il reste un objectif politique essentiel pour de nombreux diplomates du climat, ancrant les efforts internationaux en matière de climat et stimulant l’ambition. Mais pour la quasi-totalité des experts du GIEC interrogés par le Guardian, il est mort. Un scientifique d’une nation insulaire du Pacifique a déclaré : « L’humanité se dirige vers la destruction. Nous devons nous apprécier, nous aider et nous aimer les uns les autres ».

Lisa Schipper a déclaré : « Certains affirment que si nous disons qu’il est trop tard pour 1,5 °C, nous nous condamnons à la défaite et nous disons qu’il n’y a rien à faire, mais je ne suis pas d’accord. »

Jonathan Cullen, de l’université de Cambridge, a été particulièrement direct : « 1,5 °C est un jeu politique – nous n’allions jamais atteindre cet objectif ».

L’urgence climatique est déjà là. Un réchauffement d’à peine 1 °C a amplifié les conditions météorologiques extrêmes de la planète, provoquant des vagues de chaleur brûlante aux États-Unis, en Europe et en Chine, qui n’auraient pas été possibles autrement. Des millions de personnes sont très probablement déjà mortes prématurément à cause de cela. À seulement 2 °C, la vague de chaleur brutale qui a frappé le Nord-Ouest Pacifique de l’Amérique en 2021 sera 100 à 200 fois plus probable.

Mais un monde plus chaud de 2,5 °C, 3 °C ou pire, comme le prévoient la plupart des experts, nous entraîne dans un territoire véritablement inexploré. Il est difficile de dresser une carte complète de ce nouveau monde. Les liens étroits qui unissent notre société mondiale signifient que l’impact des chocs climatiques à un endroit donné peut se répercuter dans le monde entier, sous la forme de hausses des prix des denrées alimentaires, de ruptures des chaînes d’approvisionnement et de migrations.

Une étude relativement simple a examiné l’impact d’une hausse de 2,7 °C, soit la moyenne des réponses données dans l’enquête du Guardian. Elle a révélé que 2 milliards de personnes étaient poussées hors de la « niche climatique » de l’humanité, c’est-à-dire les conditions favorables dans lesquelles l’ensemble de la civilisation humaine s’est développée au cours des 10 000 dernières années.

La dernière évaluation du GIEC consacre des centaines de pages aux impacts climatiques, avec des pertes irréversibles pour la forêt amazonienne, des dommages causés par les inondations multipliés par quatre et des milliards de personnes supplémentaires exposées à la dengue. Avec un réchauffement planétaire de 3 °C, des villes comme Shanghai, Rio de Janeiro, Miami et La Haye se retrouveront sous le niveau de la mer.

« C’est la plus grande menace à laquelle l’humanité ait été confrontée, avec le potentiel de détruire notre tissu social et notre mode de vie. Elle risque de tuer des millions, voire des milliards de personnes, par la famine, la guerre pour les ressources, les déplacements de population », a déclaré James Renwick, de l’université Victoria de Wellington, en Nouvelle-Zélande. « Aucun d’entre nous ne sera épargné par la dévastation. »

« J’ai très peur – je ne vois pas comment nous pourrons sortir de ce pétrin », a déclaré Tim Benton, expert en sécurité alimentaire et en systèmes alimentaires au sein du groupe de réflexion Chatham House. Selon lui, le coût de la protection des populations et de la reconstruction après les catastrophes climatiques sera énorme, avec encore plus de discordes et de retards pour savoir qui paiera les factures. De nombreux experts s’inquiètent de la production alimentaire : « Nous commençons à peine à en voir les effets », a déclaré l’un d’entre eux.

Les points de basculement climatiques, où une augmentation minime de la température fait basculer des éléments cruciaux du système climatique dans l’effondrement, tels que la calotte glaciaire du Groenland, la forêt amazonienne et les principaux courants atlantiques, constituent un autre sujet de préoccupation majeur. « La plupart des gens ne réalisent pas l’ampleur de ces risques », a déclaré Wolfgang Cramer, de l’Institut Méditerranéen de Biodiversité et d’ Ecologie marine et continentale.

« L’humanité entière doit s’unir et coopérer »

Face à un danger aussi colossal, pourquoi la réponse du monde est-elle si lente et insuffisante ? Les experts du GIEC ont massivement pointé du doigt un obstacle : le manque de volonté politique. Près de trois quarts des personnes interrogées ont cité ce facteur, 60 % d’entre elles blâmant également les intérêts corporatistes.

« Le changement climatique est une menace existentielle pour l’humanité et le manque de volonté politique et les intérêts corporatistes nous empêchent de nous y attaquer. Je m’inquiète de l’avenir dont hériteront mes enfants », a déclaré Lorraine Whitmarsh, de l’université de Bath, au Royaume-Uni.

Le manque d’argent n’est une préoccupation que pour 27 % des scientifiques, ce qui suggère que la plupart d’entre eux pensent que les fonds nécessaires au financement de la transition écologique existent. Peu de personnes interrogées ont estimé que le manque de technologies vertes ou de compréhension scientifique de la question constituait un problème – 6 % et 4 % respectivement.

« L’humanité tout entière doit s’unir et coopérer. Il s’agit d’une occasion formidable de mettre les différences de côté et de travailler ensemble », a déclaré Louis Verchot, du Centre international d’agriculture tropicale en Colombie. « Malheureusement, le changement climatique est devenu un sujet de discorde politique… Je me demande jusqu’à quel point la crise doit s’aggraver avant que nous commencions tous à ramer dans la même direction. »

Dipak Dasgupta, économiste et ancien conseiller du gouvernement indien, a déclaré que la réflexion à court terme des gouvernements et des entreprises constituait un obstacle majeur. L’action en faveur du climat nécessite une planification à l’échelle de la décennie, contrairement aux cycles électoraux qui ne durent que quelques années, ont déclaré d’autres intervenants.

Selon de nombreux scientifiques, un monde de chaos climatique exigerait que l’on se concentre davantage sur la protection des populations contre les impacts inévitables, mais là encore, la politique se met en travers du chemin. « Plusieurs billions de dollars ont été liquidés pour être utilisés pendant la pandémie, mais il semble qu’il n’y ait pas assez de volonté politique pour engager plusieurs milliards de dollars dans le financement de l’adaptation », a déclaré Shobha Maharaj, de Trinité-et-Tobago.

La mainmise des richissimes entreprises de combustibles fossiles et des pétro-États, dont le pétrole, le gaz et le charbon sont à l’origine de la crise climatique, sur les politiciens et les médias a été fréquemment citée. « Les intérêts économiques des nations priment souvent », a déclaré Lincoln Alves, de l’Institut national brésilien de recherche spatiale.

Stephen Humphreys, de la London School of Economics, a déclaré : « Le calcul tacite des décideurs, en particulier dans l’anglosphère (États-Unis, Canada, Royaume-Uni, Australie), mais aussi en Russie et chez les principaux producteurs de combustibles fossiles du Moyen-Orient, nous entraîne dans un monde où les plus vulnérables souffriront, tandis que les mieux lotis espéreront rester à l’abri au-dessus de la ligne de flottaison », même avec l’augmentation cataclysmique de 3 °C à laquelle il s’attend. À la question de savoir quelle action individuelle serait efficace, il a répondu : « La désobéissance civile ».

La désinformation est une préoccupation majeure pour les scientifiques, du Brésil à l’Ukraine. Elle polarise la société, aggrave la mauvaise compréhension des risques climatiques par le public et empêche les gens de voir que presque toutes les solutions climatiques nécessaires sont à portée de main, ont-ils déclaré.

« L’énormité du problème n’est pas bien comprise », a déclaré Ralph Sims, de l’université Massey en Nouvelle-Zélande. « Il y aura donc des millions de réfugiés environnementaux, des phénomènes climatiques extrêmes, des pénuries de nourriture et d’eau, avant que la majorité n’accepte l’urgence de réduire les émissions – et il sera alors trop tard. »

« Le capitalisme nous a bien formés »

« Battez-vous pour un monde plus juste ». Ce simple message d’un scientifique français reflète les pensées de nombreuses personnes, qui ont déclaré que l’énorme fossé entre les riches et les pauvres de la planète constituait un obstacle de taille à l’action climatique, faisant écho à l’abîme entre ceux qui sont responsables du plus grand nombre d’émissions et ceux qui souffrent le plus des conséquences.

Selon Esteban Jobbágy, de l’université de San Luis en Argentine, la solidarité mondiale pourrait permettre de surmonter n’importe quelle crise environnementale. « Mais les inégalités croissantes actuelles constituent l’obstacle numéro un à cet égard. »

Aditi Mukherji, du groupe de recherche CGIAR, a déclaré : « Les pays riches ont accaparé tout le budget carbone, ne laissant que très peu au reste du monde. » Le Nord de la planète a l’énorme obligation de résoudre un problème qu’il a lui-même créé en réduisant ses émissions et en fournissant un financement pour le climat au reste du monde, a-t-elle ajouté. Le gouvernement indien a récemment chiffré cette obligation à au moins 1 milliard de dollars par an.

La surconsommation dans les pays riches a également été citée comme un obstacle. « Je me sens résigné au désastre, car nous ne pouvons pas séparer notre amour du plus grand, du meilleur, du plus rapide, du plus grand nombre, de ce qui aidera le plus grand nombre de personnes à survivre et à s’épanouir », a déclaré un scientifique américain. « Le capitalisme nous a bien formés. »

Maisa Rojas, scientifique du GIEC et ministre chilienne de l’environnement, a quant à elle déclaré : « Nous devons faire comprendre que l’action sur le changement climatique est une bonne chose, avec un soutien adéquat de l’État, plutôt qu’un fardeau personnel. »

Elle fait partie de la minorité d’experts interrogés – moins de 25 % – qui pensent encore que l’augmentation de la température mondiale sera limitée à 2 °C ou moins. La météorologue sénégalaise Aïda Diongue-Niang, vice-présidente du GIEC, en fait aussi partie : « Je pense que des mesures plus ambitieuses seront prises pour éviter une hausse de 2,5 à 3 °C. »

Pourquoi ces scientifiques sont-ils optimistes ? L’une des raisons est le déploiement rapide des technologies vertes, des énergies renouvelables aux voitures électriques, grâce à la baisse rapide des prix et aux nombreux avantages qui en découlent, comme l’assainissement de l’air. « Sauver le climat devient de moins en moins coûteux », a déclaré Lars Nilsson, de l’université de Lund, en Suède.

Selon Mark Pelling, de l’University College London, même le besoin croissant de protéger les communautés contre les inévitables vagues de chaleur, inondations et sécheresses pourrait avoir un côté positif. « Cela ouvre des perspectives passionnantes : en devant vivre avec le changement climatique, nous pouvons nous adapter d’une manière qui nous conduise à un mode de vie plus inclusif et plus équitable. »

Dans un tel monde, l’adaptation irait de pair avec la réduction de la pauvreté et de la vulnérabilité, la fourniture de meilleurs logements, d’une eau et d’une électricité propres et fiables, de meilleurs régimes alimentaires, d’une agriculture plus durable et d’une pollution atmosphérique moindre.

Cependant, la plupart des espoirs sont restés très prudents. « La bonne nouvelle, c’est que le pire scénario est évitable », a déclaré Michael Meredith, du British Antarctic Survey. « Nous avons encore la possibilité de construire un avenir beaucoup plus clément sur le plan climatique que celui que nous connaissons actuellement. » Mais il s’attend également à ce que « nos sociétés soient forcées de changer et que les souffrances et les dommages causés aux vies et aux moyens de subsistance soient graves ».

« Je crois aux points de basculement sociaux« , où de petits changements dans la société déclenchent une action climatique à grande échelle, a déclaré Elena López-Gunn, de la société de recherche Icatalist en Espagne. « Malheureusement, je crois aussi aux points de basculement climatiques physiques. »

Retour au Mexique, Mme Cerezo-Mota ne sait toujours pas ce qu’il en est : « Je ne sais vraiment pas ce qui doit se passer pour les personnes qui ont tout le pouvoir et tout l’argent pour faire changer les choses le fasse. Mais quand je vois les jeunes générations se battre, je retrouve un peu d’espoir ».


Note : Julian Ganz a fourni le soutien technique nécessaire à la réalisation de l’enquête, qui a été envoyée le 31 janvier 2024. Les hommes représentent 68 % des répondants, les femmes 28 % et 4 % ont préféré ne pas préciser leur sexe. Cette répartition reflète celle des auteurs du GIEC. La grande majorité des scientifiques (89 %) étaient âgés de 40 à 69 ans et provenaient de 35 pays différents, chaque continent étant représenté par des dizaines d’experts. Les questions sur l’âge et le sexe n’étaient pas obligatoires, mais 344 et 346 personnes respectivement y ont répondu.

Extraits de séquences et d’images tirées de la couverture du climat par le Guardian.
Cet article a été modifié le 10 mai 2024. Une version antérieure indiquait que Stephen Humphreys, de la London School of Economics, s’attendait à une augmentation de 3,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels au cours de ce siècle ; ce chiffre aurait dû être 3 °C.



2023, het jaar van alle klimaatrecords. Waarom?

Xavier Fettweis (*)

Vertaling: deepl Josette – Fr


Voor het eerst sinds het pre-industriële tijdperk (1850-1900) is de beroemde drempel van +1,5°C bereikt of bijna bereikt (+1,48°C gerapporteerd door Copernicus (*) op wereldschaal, waardoor het vorige record (2017) van +0,17°C is verbrijzeld. Sinds juli 2023 breken de temperaturen bijna elke dag vorige dagrecords, met anomalieën op wereldschaal die in de afgelopen maanden soms +2°C bereikten. Tot slot heeft de stijging van de zeespiegel in 2023 een ‘sprong voorwaarts’ gemaakt, met een stijging van bijna een factor twee ten opzichte van voorgaande jaren. Deze versnelling van de zeespiegelstijging is niet te wijten aan het plotselinge smelten van de poolkappen, maar aan de thermische uitzetting van de oceanen, die in 2023 ‘plotseling’ opwarmden. In de Noord-Atlantische Oceaan steeg de oppervlaktetemperatuur bijvoorbeeld met +0,4°C ten opzichte van 2022, terwijl die in de periode 2020-2022 nauwelijks was veranderd. Maar waarom is de temperatuur van de oceanen zo sterk gestegen, meer bepaald in de noordelijke Atlantische en Stille Oceaan?

Ten eerste is het duidelijk dat deze klimaatanomalieën een direct gevolg zijn van de voortdurende opwarming van de aarde (die door het IPCC ondubbelzinnig wordt toegeschreven aan menselijke activiteiten). Terwijl we de mediaan van de IPCC-klimaatmodellen al enkele jaren volgen, springt 2023 eruit door nu het 20%-percentiel te bereiken van de 30 mondiale modellen die hier worden bekeken. Volgens de mediaan van de modellen voor het SSP370-scenario (+3°C traject) werd een anomalie van +1,5°C niet voorspeld vóór 2030, wat suggereert dat andere factoren dan de opwarming van de aarde een impact hebben gehad op de temperatuurstijging in 2023.

Deze andere factoren omvatten het El Niño-fenomeen dat sinds de lente van 2023 aan de gang is. El Niño verhindert dat koud water naar het oppervlak stijgt in het zuidelijke deel van de Stille Oceaan maar verklaart a priori alleen de positieve anomalie ten westen van Zuid-Amerika.

Een andere natuurlijke factor die mogelijk een invloed heeft gehad op de temperaturen is de uitbarsting van de Tongavulkaan (ook in het zuidelijke deel van de Stille Oceaan) in januari 2022. Die uitbarsting heeft een grote hoeveelheid water in de atmosfeer gestuwd, wat het krachtigste broeikasgas is. Vulkanen spelen echter ook een verkoelende rol door aërosolen uit te stoten die de zonnestralen weerkaatsen en de vorming van wolken bevorderen die ook de zonnestralen weerkaatsen. In het geval van de Tongavulkaan wordt gedacht dat het opwarmende effect van waterdamp sterker is dan dat van aërosolen, maar daar lijkt niet iedereen het over eens te zijn. Aangezien de verblijftijd van waterdamp en aerosolen die in de atmosfeer worden uitgestoten in principe minder dan 1 jaar is, kunnen we aannemen dat dit een kleine rol zou hebben gespeeld in de temperatuurafwijkingen die in 2023 werden waargenomen.

Om de opwarming van de noordelijke Atlantische Oceaan te verklaren, die sinds maart 2023 nog nooit zo warm is geweest, wordt vaak gewezen naar een nieuwe wetgeving in de scheepvaart in 2020 die het zwavelgehalte van scheepsbrandstoffen drastisch heeft verlaagd. Deze zwavel-aerosolen (die schadelijk zijn voor de gezondheid) hebben, net als die van vulkanen, de opwarming van de oceanen tot nu toe afgezwakt. Het lijdt geen twijfel dat minder aerosolen boven de oceanen meer zonlicht op het oppervlak van de oceanen betekent, die daardoor meer opwarmen. Toch zou de vermindering van deze aerosolen een totale impact van niet meer dan +0,05°C (*) hebben en zou het op zichzelf dus niet de opwarming van de noordelijke Atlantische en Stille Oceaan kunnen verklaren. Er moet echter worden opgemerkt dat de rol van aerosolen bij de vorming van lage wolken zeer moeilijk te beoordelen is met klimaatmodellen, omdat het gaat om submazige processen die sterk afhankelijk zijn van de in de modellen gebruikte parametrisaties, waardoor hun afkoelende rol onderschat zou kunnen worden.

Tot slot, rekening houdend met het feit dat de waargenomen vertraging (*) van de thermohaliene circulatie (MOOC in het Engels) de opwarming van de noordelijke Atlantische Oceaan waarschijnlijk eerder zal afzwakken dan versnellen, is het ook mogelijk dat een positieve terugkoppeling waarmee in de modellen slecht rekening is gehouden, ervoor zorgt dat de noordelijke Atlantische Oceaan meer opwarmt, of dat deze versnelling van de opwarming gewoon het resultaat is van natuurlijke klimaatvariabiliteit, bijvoorbeeld gekoppeld aan de Atlantische Multidecadale Oscillatie. Het jaar 2024 wordt daarom bijzonder interessant om in de gaten te houden om te zien of i) deze opwarming van de oceanen versnelt, wat zou suggereren dat de modellen de opwarming van de aarde onderschatten, of ii) integendeel, of we terugkeren naar meer normale omstandigheden, rekening houdend met het feit dat we dit jaar in ‘La Niña’-modus zullen zijn (koude anomalie in de zuidelijke Stille Oceaan). Hoe dan ook, ook al zijn er nog veel onzekerheden, dit alles toont dat de toekomstprojecties zeker niet te pessimistisch zijn zoals veel mensen denken, maar dat ze integendeel de laagste schatting zijn van wat we kunnen verwachten als we niet stoppen met broeikasgassen uit te stoten.


2023, l’année de tous les records climatiques. Pourquoi ?

Xavier Fettweis (*)

Pour la première fois depuis l’ère préindustrielle (1850-1900), le fameux seuil de +1.5°C a été atteint ou presque (+1.48°C signalé par Copernicus (*) à l’échelle globale pulvérisant le précédent record (2017) de +0.17°C. Depuis juillet 2023, c’est en fait tous les jours ou presque que la température bat les précédents records journaliers avec des anomalies à l’échelle globale atteignant parfois les +2°C ces derniers mois. Enfin, la hausse du niveau des mers a fait un « bond » en 2023 en augmentant de presque un facteur deux par rapport aux précédentes années. Si une telle accélération de la hausse du niveau marin a été observée, ce n’est pas à cause d’une fonte subite des calottes polaires mais, à cause de l’expansion thermique des océans qui se sont « subitement » réchauffés en 2023. En Atlantique Nord par exemple, la température de surface a augmenté de +0.4°C par rapport à 2022 alors qu’elle n’avait quasiment plus évolué sur la période 2020-2022. Mais pourquoi un tel emballement des températures des océans, en particulier de l’Atlantique et Pacifique Nord ?

Tout d’abord, il est évident que ces anomalies climatiques sont une conséquence directe du réchauffement global en cours (attribué sans équivoque aux activités humaines par le GIEC). Alors qu’on suivait la médiane des modèles du climat du GIEC depuis quelques années, 2023 sort du lot en atteignant maintenant le percentile 20 % des 30 modèles globaux considérés ici. Selon la médiane des modèles pour le scénario SSP370 (trajectoire +3°C), une anomalie de +1.5°C n’était pas prévue avant 2030 ce qui suggère que d’autres facteurs que le réchauffement climatique ont impactés la hausse des températures en 2023.

Parmi ces autres facteurs, citons d‘abord l’événement El Niño en cours depuis le printemps 2023 empêchant les eaux froides de remonter en surface dans le Pacifique Sud mais expliquant à priori uniquement l’anomalie positive à l’ouest de l’Amérique du Sud.

Comme autre facteur naturel qui pourrait avoir impacté la température, il y a l’éruption du Volcan Tonga (toujours dans le Pacifique Sud) en Janvier 2022 qui a propulsé dans l’atmosphère une importante quantité d’eau qui, rappelons-le, est le gaz a effet de serre le plus puissant. Toutefois, les volcans ont aussi un rôle refroidissant en émettant des aérosols qui vont réfléchir les rayonnements du soleil et favoriser la formation de nuages réfléchissant eux aussi les rayons du soleil. Dans le cas du volcan Tonga, l’effet réchauffant de la vapeur d’eau serait plus fort que celui des aérosols mais tout le monde ne semble pas d’accord sur ce sujet. Sachant que le temps de résidence de la vapeur d’eau et des aérosols émis dans l’atmosphère est à priori inférieur à 1 an, on peut donc supposer qu’il aurait jouer un rôle mineur dans les anomalies de température observées en 2023.

Pour expliquer le réchauffement de l’Atlantique Nord qui n’a jamais été aussi chaud à l’échelle journalière depuis mars 2023, une nouvelle législation dans le transport maritime en 2020 qui a réduit drastiquement la teneur en soufre des carburants des bateaux est souvent pointée du doigt. Ces aérosols de soufre (nocifs pour la santé), comme ceux des volcans, atténuaient le réchauffement des océans jusqu’à maintenant. Même si cela ne fait aucun doute qu’avec moins d’aérosols au-dessus des océans, plus de soleil arrive maintenant à la surface des océans qui se réchauffent donc d’avantage, la diminution de ces aérosols aurait toutefois un impact global d’au plus +0.05°C (*) et ne pourrait donc pas expliquer à elle seule le réchauffement de l’Atlantique Nord et du Pacifique Nord. Notons toutefois que le rôle des aérosols sur la formation de nuages bas est très difficile à évaluer par les modèles du climat car cela fait intervenir des processus sous-maille très dépendants des paramétrisations utilisées dans les modèles, qui pourraient donc sous-estimer leur rôle refroidissant.

Enfin, sachant que le ralentissement observé (*) de la circulation thermohaline (MOOC en anglais) devrait plutôt atténuer le réchauffement de l’Atlantique Nord que l’accélérer, il est aussi possible qu’une rétroaction positive mal prise en compte dans les modèles emballe le réchauffement de l’Atlantique Nord ou alors, que cette accélération du réchauffement n’est que le résultat de la variabilité naturelle du climat liée à l’Oscillation Atlantique Multi-décennale par exemple. L’année 2024 sera donc particulièrement intéressante à surveiller pour vérifier i) si ce réchauffement des océans s’accélère ce qui suggérerait que les modèles sous-estimeraient le réchauffement global ou, ii) au contraire, si on revient dans des conditions plus normales sachant qu’on sera cette année en mode « La Niña » (anomalie froide dans le Pacifique Sud). Dans tous les cas, même s’il y a encore beaucoup d’incertitudes, tout ceci montre que les projections futures ne sont certainement pas trop pessimistes comme beaucoup le pensent mais au contraire, elles sont la fourchette basse de ce qui nous pourrait nous attendre si on ne stoppe pas nos émissions de gaz à effet de serre.


Documentation : mers et océans


Dixième record

Le dixième record de chaleur mensuel consécutif inquiète et déconcerte les climatologues

Si l’anomalie ne se stabilise pas d’ici le mois d’août, « le monde se retrouvera en territoire inconnu », déclare un expert du climat

Jonathan Watts

Traduction Deepl Josette – The Guardian

Un mois de plus, un nouveau record de chaleur à l’échelle mondiale qui laisse les climatologues perplexes, espérant qu’il s’agit d’un phénomène lié à El Niño et non d’un symptôme d’une santé planétaire plus mauvaise que prévu.

Les températures à la surface du globe en mars étaient supérieures de 0,1 °C au précédent record pour ce mois, établi en 2016, et de 1,68 °C à la moyenne préindustrielle, selon les données publiées mardi par le Copernicus Climate Change Service.

Il s’agit du dixième record mensuel consécutif dans une phase de réchauffement qui a pulvérisé tous les records précédents. Au cours des 12 derniers mois, les températures mondiales moyennes ont été supérieures de 1,58 °C aux niveaux préindustriels.

Ce chiffre dépasse, du moins temporairement, le seuil de 1,5 °C fixé comme objectif dans l’accord de Paris sur le climat, mais cet accord historique ne sera considéré comme violé que si cette tendance se poursuit à l’échelle d’une décennie.

Le Met Office britannique a précédemment prédit que l’objectif de 1,5 °C pourrait être dépassé sur une période d’un an et d’autres organisations de surveillance du climat ont déclaré que les niveaux actuels de réchauffement restaient dans les limites prévues par les modèles informatiques.

Toutefois, la forte augmentation des températures au cours de l’année écoulée a surpris de nombreux scientifiques et suscité des inquiétudes quant à une éventuelle accélération du réchauffement.

Diana Ürge-Vorsatz, l’une des vice-présidentes du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) des Nations Unies, a noté que la planète s’est réchauffée à un rythme de 0,3 °C par décennie au cours des 15 dernières années, soit près du double de la tendance de 0,18 °C par décennie observée depuis les années 1970. « Est-ce dans la fourchette de la variabilité climatique ou le signal d’un réchauffement accéléré ? Je crains qu’il ne soit trop tard si nous attendons de voir », a-t-elle tweeté.

Gavin Schmidt, directeur de l’Institut Goddard d’études spatiales de la NASA, a noté que les records de température sont battus chaque mois de 0,2°C. « C’est une leçon d’humilité et un peu d’inquiétude que d’admettre qu’aucune année n’a autant déconcerté les capacités de prévision des climatologues que 2023 », a écrit le successeur de Jim Hansen dans un récent article publié dans la revue Nature.

M. Schmidt a énuméré plusieurs causes plausibles de l’anomalie : l’effet El Niño, la réduction des particules de dioxyde de soufre refroidissantes due aux mesures antipollution, les retombées de l’éruption volcanique Hunga Tonga-Hunga Ha’apai de janvier 2022 à Tonga, et l’intensification de l’activité solaire à l’approche d’un maximum solaire prévu.

Toutefois, sur la base d’analyses préliminaires, il a déclaré que ces facteurs n’étaient pas suffisants pour expliquer l’augmentation de 0,2 °C. « Si l’anomalie ne se stabilise pas d’ici le mois d’août – ce qui est une attente raisonnable si l’on se réfère aux événements El Niño précédents – le monde se retrouvera en territoire inconnu. Cela pourrait signifier que le réchauffement de la planète modifie déjà fondamentalement le fonctionnement du système climatique, bien plus tôt que les scientifiques ne l’avaient prévu ».

Le cœur du problème – les émissions de combustibles fossiles – est bien connu et largement incontesté par la communauté scientifique. Une enquête portant sur près de 90 000 études liées au climat montre qu’il existe un consensus à 99,9 % sur le fait que l’homme modifie le climat en brûlant du gaz, du pétrole, du charbon et des arbres.

« Pour arrêter le réchauffement, il faut réduire rapidement les émissions de gaz à effet de serre », a déclaré Samantha Burgess, directrice adjointe du Copernicus Climate Change Service.

Michael E. Mann, le scientifique dont le « graphique de la crosse de hockey » de 1999 a montré la forte augmentation des températures mondiales depuis l’ère industrielle, a déclaré que les tendances actuelles étaient prévisibles compte tenu de l’augmentation continue des émissions. Mais il a ajouté que cela ne devait pas être une source de réconfort. « Le monde se réchauffe AUSSI VITE que nous l’avions prédit, et c’est déjà assez grave », a-t-il tweeté.

Ce n’est pas la science qui s’oppose à ce point de vue, mais l’industrie des combustibles fossiles – en particulier les 57 entreprises responsables de 80 % des émissions – qui risque de perdre des milliers de milliards de dollars. Le mois dernier, le directeur général de Saudi Aramco, Amin Nasser, a été applaudi lors d’une conférence de l’industrie pétrolière à Houston pour avoir déclaré : « Nous devrions abandonner l’idée d’éliminer progressivement le pétrole et le gaz ». Cette déclaration a été faite alors que son pays et d’autres avaient accepté, quatre mois auparavant, de renoncer aux combustibles fossiles lors du sommet sur le climat de la Cop28 à Dubaï.



9 juin, participer aux débats

ObsAnt.eu

Le dimanche 9 juin 2024, se dérouleront les élections européennes, fédérales et régionales belges.

L’Observatoire de l’Anthropocène vous aide à participer aux différents débats qui animent ces dernières semaines avant le scrutin.

Deux outils ont été mis en ligne

Juin2024.eu

Sur ces pages, nous collationnons pour vous des références d’articles, de propositions, de mémos et d’informations concrètes. Plus de 200 références.

Un blog reprend des articles en lien avec cette actualité.

En consultant ces pages, mises à jour régulièrement, vous aurez un aperçu des initiatives alternatives aux programmes des partis déjà représentés dans les différents parlements.

https://obsant.eu/juin-2024-blog/

Le Parti climat

Quelles pourraient être les propositions prenant réellement en compte les urgences écologiques et climatiques ?

Comment faire entrer notre société dans le cadre d’une trajectoire sociétale compatible avec les contraintes énergétiques et environnementales ?

Le Parti Climat – projet porté par l’Observatoire de l’Anthropocène – vous propose de retrouver les idées, propositions, programmes, mémorandums, contributions issus d’associations ou de particuliers sur les thèmes de l’écocide, du climat, de l’environnement, la biodiversité et la santé.

Avec le Parti Climat, il vous est possible de participer en proposant – individuellement ou collectivement – vos idées pour une société plus résiliente.

https://obsant.eu/parti-climat/

Un Agenda alternatif est également mis à votre disposition :

https://obsant.eu/events/

Une démocratie, c’est aussi la richesse des débats citoyens.

N’hésitez pas.



Pourquoi la mer est-elle si chaude ?

Elizabeth Kolbert

Article traduit avec DeepL.com (version gratuite) – The New Yorker 15 mars 2024

Une hausse surprenante des températures à la surface de la mer suggère que nous ne comprenons peut-être pas à quelle vitesse le climat change.


Au début de l’année 2023, les climatologues – et tous ceux qui prêtent attention aux données – ont commencé à remarquer quelque chose d’étrange. Au début du mois de mars, les températures à la surface des océans ont commencé à augmenter. En avril, elles avaient établi un nouveau record : la température moyenne à la surface des océans du monde, à l’exception de ceux situés aux pôles, était légèrement inférieure à 70 degrés (fahrenheit soit +- 21,11 degrés Celcius). D’ordinaire, les températures de surface les plus élevées de l’année sont observées en mars, vers la fin de l’été dans l’hémisphère sud. L’année dernière, les températures sont restées anormalement élevées tout au long de l’automne de l’hémisphère sud et au-delà, battant les records mensuels de mai, juin, juillet et d’autres mois. L’Atlantique Nord a été particulièrement chaud ; selon Copernicus, un service spatial de l’Union européenne, les températures dans le bassin étaient « hors normes ».

Depuis le début de l’année 2024, les températures à la surface des océans ont continué à augmenter ; en février, elles ont établi un nouveau record. Dans un monde qui se réchauffe, la température des océans devrait augmenter et continuer à augmenter. Mais au cours des douze derniers mois, les mers ont été si fébriles que les scientifiques commencent à s’inquiéter non seulement de l’impact physique de toute cette chaleur, mais aussi de ses implications théoriques. L’année écoulée peut-elle s’expliquer par ce que l’on sait déjà du changement climatique ou existe-t-il des forces à l’œuvre qui n’ont pas été prises en compte ? Et, dans ce dernier cas, cela signifie-t-il que les prévisions de réchauffement, déjà très sombres, sous-estiment les dangers ?

« Nous ne savons pas vraiment ce qui se passe », m’a dit Gavin Schmidt, directeur de l’Institut Goddard d’études spatiales de la NASA. « Et nous ne savons pas vraiment ce qui se passe depuis le mois de mars de l’année dernière. Il a qualifié la situation d' »inquiétante ».

L’hiver dernier, avant que les températures océaniques n’atteignent leur niveau record, le monde se trouvait dans la phase froide – ou La Niña – d’un schéma climatique désigné par l’acronyme enso. En été, une phase El Niño ou chaude avait commencé. Étant donné que les températures océaniques ont commencé à augmenter avant le début d’El Niño, ce changement ne semble pas suffire à expliquer ce qui se passe. Par ailleurs, l’ampleur des records battus dépasse ce que l’on observe habituellement pendant les El Niños.

« Ce n’est pas comme si nous battions des records de temps en temps », a déclaré Brian McNoldy, chercheur sur les ouragans à l’université de Miami. « C’est comme si l’ensemble du climat avait fait un bond en avant de cinquante ou cent ans. C’est dire à quel point cela semble étrange. On estime qu’en 2023, la teneur en chaleur des deux mille mètres supérieurs des océans a augmenté d’au moins neuf zettajoules. À titre de comparaison, la consommation annuelle d’énergie dans le monde s’élève à environ 0,6 zettajoule.

Plusieurs circonstances et événements ont été cités comme pouvant contribuer à la chaleur anormale de l’année dernière. L’un d’entre eux est l’éruption, en janvier 2022, d’un volcan sous-marin du Pacifique Sud appelé Hunga Tonga-Hunga Ha’apai. Habituellement, les volcans émettent du dioxyde de soufre, qui produit un effet de refroidissement temporaire, et de la vapeur d’eau, qui produit l’effet inverse. Le Hunga Tonga-Hunga Ha’apai a produit relativement peu de dioxyde de soufre, mais une quantité fantastique de vapeur d’eau, et l’on pense que ses effets de réchauffement se font encore sentir.

Un autre facteur est le cycle solaire actuel, connu sous le nom de cycle solaire 25. L’activité solaire s’intensifie – elle devrait atteindre son maximum cette année ou l’année prochaine – et il est possible qu’elle soit également à l’origine d’un réchauffement supplémentaire.

Un autre facteur est la modification de la composition des carburants utilisés pour le transport maritime. Les réglementations entrées en vigueur en 2020 ont réduit la quantité de soufre dans le carburant utilisé par les superpétroliers. Cette réduction a entraîné une diminution d’un type de pollution atmosphérique qui, par des effets directs et indirects, réfléchit la lumière du soleil vers l’espace. On pense que ce changement a entraîné une augmentation de la quantité d’énergie absorbée par les mers, bien qu’il soit difficile de quantifier cet effet.

Tous ces facteurs réunis peuvent-ils expliquer ce qui se passe ? Les climatologues affirment que c’est possible. Le système climatique est également très bruyant. « Il pourrait s’agir d’une simple variabilité naturelle », a déclaré Susan Wijffels, scientifique principale à la Woods Hole Oceanographic Institution.

Mais il se passe peut-être quelque chose d’autre, que les scientifiques n’ont pas encore pris en compte. Ce printemps, l’enso devrait passer à ce que les scientifiques appellent des conditions « neutres ». Si les précédents se confirment, les températures des océans devraient alors commencer à s’aligner davantage sur les tendances à long terme.

« Je pense que le véritable test sera ce qui se passera au cours des douze prochains mois », a déclaré M. Wijffels. Si les températures restent très élevées, je dirais qu’un plus grand nombre de personnes au sein de la communauté s’alarmeront et diront « O.K., c’est en dehors de ce que nous pouvons expliquer ». « 

En 2023, qui a été de loin l’année la plus chaude jamais enregistrée sur terre et dans les océans, de nombreux pays ont connu des vagues de chaleur record, des incendies de forêt record, des tempêtes de pluie record ou une combinaison de ces phénomènes. (L’année dernière, aux États-Unis, vingt-huit catastrophes météorologiques ont causé plus d’un milliard de dollars de dégâts, un autre record). Si les projections climatiques sont exactes, alors l’année a été un avant-goût des choses à venir, ce qui est déjà assez effrayant. Mais si les projections manquent quelque chose, c’est potentiellement encore plus terrifiant, même si les scientifiques ont tendance à utiliser des termes plus mesurés.

« L’autre possibilité est que nous commencions à observer des changements dans la façon dont le système réagit », a observé M. Schmidt. « Toutes les statistiques dont nous parlons sont tirées des données antérieures. Mais rien dans les données antérieures ne ressemblait à 2023. Cela signifie-t-il que les données antérieures ne sont plus prédictives parce que le système a changé ? Je ne peux pas l’exclure, et ce serait évidemment très préoccupant ».



Luttes paysannes

Rencontre entre monde paysan et autres acteurs de la société civile

Nadia Ruchard & Serge Lenaerts

Ma compagne et moi avons une petite boutique bio depuis 2002. Nous y proposons des vêtements, de l’alimentation et de l’artisanat local ou du sud. Le 25 janvier dernier, nous avons participé à une rencontre entre des acteurs du monde paysan et d’autres acteurs de la société civile. Nous avons envoyé aux personnes de nos réseaux, aux client·es de notre magasin, un résumé de cette rencontre. Nous avons contacté quelques magasins bio que nous connaissons pour leur demander de relayer l’information auprès de leur client·es également. Trois d’entre eux l’ont déjà fait. Le résumé que nous avons envoyé se trouve ci-dessous.

Nous avons déjà eu des retours très positifs.

Ce résumé ne reprend pas que des sujets abordés lors de la soirée. Nous avons repris des éléments qui sont communs à l’ensemble des mouvements de luttes paysannes, et également des témoignages de paysans.

Nous allons encore essayer de contacter d’autres magasins bio et d’autres coopératives. Déplaçons la fenêtre d’Overton!

Voici le résumé que nous avons envoyé, avec des éléments supplémentaires pour que celui-ci puisse s’adresser à un public plus large que celui des clients de magasin bio:

« Bonjour à toutes et à tous,

  1. Le monde paysan se mobilise! Le 25 janvier dernier, nous avons participé à une rencontre entre des acteurs du monde paysan (paysans, fédérations, associations…) et d’autres acteurs de la société civile: mouvements écologistes de désobéissance civile, acteurs du commerce alternatif, élus, citoyens et non-citoyens engagés, membres de coopératives alimentaires, associations de lutte contre la précarité alimentaire, collectifs d’interpellation pour la sécurité alimentaire.
  2. Nous vous avons rédigé un résumé de cette rencontre. Nous avons essayé de reprendre tous les points importants pour bien comprendre les enjeux de la mobilisation paysanne actuelle. Nous pensons qu’il est important de vous partager les informations et les demandes auprès de la société civile, issus de cette rencontre.

Les revendications:

  • Stop aux accords de libre-échange et au traité UE-MERCOSUR
  • Des prix justes pour les productions agricoles et pour tous les agriculteur·trice·s
  • Stop aux incohérences des politiques européennes

Les faits:

Ce sont principalement les petites et moyennes fermes qui sont victimes de la globalisation et de l’ultra-libéralisme. Ceci entraîne l’arrivée en Europe d’aliments qui peuvent être vendus moins chers que ceux produits par ces fermes car ils n’ont pas été produits avec des normes aussi strictes qu’en Europe. De plus, elles subissent la pression de la grande distribution qui leur impose un prix d’achat qui ne leur permet plus de couvrir l’augmentation des frais de production suite aux différentes « crises ».

Ces « crises » ont également eu pour impact la diminution de la part consacrée à l’alimentation dans le budget des familles. Puisque à récolte égale, les paysans ont de moins en moins de revenus, ceux-ci doivent produire de plus en plus pour garder le même revenu. Cela est très difficile sans l’utilisation de pesticides et sans mécanisation. D’où, même s’il y a une volonté de la part des paysans de passer en agro-écologie, dans la réalité cela est quasi impossible.

Certains paysans qui pratiquent la culture bio commencent à avoir de plus en plus de difficultés de ne pas vendre une partie de leur production à la grande distribution pour avoir suffisamment de revenus. Certains d’entre-eux ont déjà dû vendre une grande partie de leur récolte à la grande distribution pour pouvoir continuer leur activité.

Une autre revendication des paysans est la diminution de la charge administrative. Celle-ci augmente constamment et prend beaucoup trop de temps par rapport à celui qui devrait être consacré à leur activité. Ce problème atteint quasi tous les métiers. Celui-ci est dû en grande partie à la numérisation, à l’utilisation de technologies de plus en plus complexes et à une volonté d’hyper contrôle de la part des Etats.

Les paysans dénoncent également une injustice dans le système d’attribution des subsides de la PAC qui favorise les grandes exploitations au détriment des plus petites.

Enfin, c’est surtout un manque de sens et de reconnaissance qui conduit parfois jusqu’au suicide. Les paysans les plus mécanisés qui utilisent des hautes technologies, expriment une perte de sens dans ce qu’ils font. Ils constatent qu’ils deviennent de plus en plus un simple rouage au sein d’une méga machine industrielle et qu’ils perdent même petit à petit le contact avec la terre.

Les demandes auprès de la société civile:

Ces acteurs du monde paysans demandent à la société civile de soutenir les petites et moyennes fermes. Et ce peu importe si elles utilisent ou non l’agroécologie comme moyens de production. Celles-ci sont toutes menacées par les méga-fermes-usines de l’agro-industrie transnationale.

Différents moyens de soutien ont été évoqués. En tant que « mangeur·euse·s » d’aliments issus du travail de la terre et en tant qu’utilisateur·trice·s d’objets faits à partir de matières naturelles, qu’ils proviennent du Nord ou du Sud, nous avons le pouvoir d’aider les paysans à se convertir à l’agroécologie.

D’une part, en augmentant de façon conséquente notre part du budget familial consacré à l’alimentation locale, de saison et issus de l’agroécologie (les personnes précarisées devraient recevoir des aides leur permettant d’acheter spécifiquement des aliments issus de l’agroécologie). Ceci permettrait aux paysans d’avoir un revenu qui leur permettrait de vivre de leur production, en produisant des aliments goûtus, bons pour la santé et qui respectent la vie.

Et d’autre part, en prenant une part active dans des actions de légitime défense civile de masse, comme par exemple le démantèlement d’entreprises « illégales » ou des occupations de terres en relais sur une longue durée. Ces entreprises en question peuvent être considérées comme « illégales » dans le sens où celles-ci ont une puissance financière telle qu’elles peuvent se permettre d’être au-dessus des lois. Le corollaire est que ces entreprises s’autorisent elles-mêmes à ne pas respecter les droits humains, ni la vie dans son ensemble.

Celles-ci s’accaparent également des terres cultivables à des prix qu’aucun jeune paysan ne pourrait proposer pour un rachat de terres. Dans le pire des cas, cette puissance financière permet à ces entreprises de convertir par la corruption des terres cultivables fertiles ou des territoires sauvages en terrains destinées à la bétonisation.

Soutenons donc les paysans et les petits producteurs, autant que nous le pouvons, par des achats conscients: locaux, sains, au prix juste et qui respectent la vie!

En tant que cliente, client, coopératrice, coopérateur, responsable de magasin ou de coopérative, mais aussi par le simple fait que nous devons toutes et tous manger et que nous dépendons toutes et tous en partie ou totalement du travail des paysans, défendons-les, mobilisons-nous, engageons-nous, indignons-nous, défendons-nous, démantelons, désarmons et résistons aux méga-fermes-usines de l’agro-industrie transnationale.

Soyons solidaires et œuvrons ensemble pour une société plus juste et pour un monde où nos enfants et descendants seront heureux de vivre !

N’hésitez-pas à partager ! »



Février en passe de battre un nombre sans précédent de records de chaleur

Jonathan Watts

Traduction Deepl Josette – The Guardian

Le mois de février est en passe de battre un nombre record de records de chaleur, selon les météorologues, car le réchauffement climatique d’origine humaine et le phénomène naturel El Niño font grimper les températures sur terre et dans les océans.

À un peu plus de la moitié du mois le plus court de l’année, le pic de chaleur est devenu si prononcé que les cartes climatiques entrent dans un nouveau territoire, notamment en ce qui concerne les températures de surface de la mer qui ont persisté et se sont accélérées au point que les observateurs experts ont du mal à expliquer comment ce changement se produit.

« La planète se réchauffe à un rythme accéléré. Nous assistons à des augmentations rapides de la température dans l’océan, le plus grand réservoir de chaleur du climat », a déclaré le Dr. Joel Hirschi, responsable associé de la modélisation des systèmes marins au Centre national d’océanographie du Royaume-Uni. « L’amplitude avec laquelle les précédents records de température de surface de la mer ont été battus en 2023 et maintenant en 2024 dépassent les attentes.
La compréhension des raisons de ce phénomène fait l’objet de recherches permanentes. »

Selon Zeke Hausfather, spécialiste des sciences de la Terre à Berkeley, l’humanité est en passe de connaitre le mois de février le plus chaud de l’histoire, après des mois de janvier, décembre, novembre, octobre, septembre, août, juillet, juin et mai records.

Selon lui, l’augmentation observée ces dernières semaines devrait entrainer un réchauffement de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels, mais il devrait s’agir de l’impact maximal et bref d’El Niño s’il suit la voie tracée les années précédentes et commence à se refroidir dans les mois à venir.

Ce serait normalement une bonne nouvelle si La Niña, qui fait baisser les températures, suivait, mais M. Hausfather a déclaré que le comportement du climat était devenu plus erratique et plus difficile à prévoir. « L’année dernière a tellement défié les attentes qu’il est difficile d’avoir autant confiance dans les approches que nous avons utilisées pour faire ces prévisions dans le passé », a-t-il déclaré. « Je dirais que février 2024 est bien placé pour battre le précédent record établi en 2016, mais ce n’est pas du tout gagné d’avance à ce stade, car les modèles météorologiques suggèrent que les températures mondiales vont redescendre au cours de la semaine à venir. Je pense donc que ces températures extrêmes sont la preuve d’une accélération du réchauffement au cours des dernières années – comme le prévoient les modèles climatiques si les émissions de CO2 ne diminuent pas mais que les aérosols le font – mais que la situation n’est pas nécessairement pire que ce que nous pensions. »

La première moitié du mois de février a choqué les observateurs météorologiques. Maximiliano Herrera, qui tient un blog sur les températures extrêmes dans le monde, a qualifié de « fou », de « folie totale » et de « réécriture de l’histoire du climat » la vague de milliers de records de chaleur enregistrés par les stations météorologiques. Ce qui l’a étonné, ce n’est pas seulement le nombre de records, mais aussi l’ampleur avec laquelle nombre d’entre eux ont dépassé tout ce qui avait été enregistré auparavant.

Au Maroc, 12 stations météorologiques ont enregistré des températures supérieures à 33,9 °C, ce qui constitue non seulement un record national pour la journée d’hiver la plus chaude, mais aussi plus de 5 °C de plus que la moyenne pour un mois de juillet. La ville de Harbin, dans le nord de la Chine, a dû fermer son festival hivernal de la glace parce que les températures ont dépassé le point de congélation pendant trois jours sans précédent ce mois-ci.

Au cours de la semaine dernière, des stations de surveillance aussi éloignées les unes des autres que l’Afrique du Sud, l’Arabie saoudite, la Thaïlande, l’Indonésie, le Kazakhstan, la Colombie, le Japon, la Corée du Nord, les Maldives et le Belize ont enregistré des records de chaleur mensuels.

Au cours de la première moitié de ce mois, 140 pays ont battu des records de chaleur mensuels, ce qui est similaire aux chiffres finaux des six derniers mois les plus chauds de l’année 2023 et plus de trois fois supérieur à tous les mois antérieurs à 2023.

La chaleur à la surface des océans continue d’étonner les observateurs chevronnés et laisse entrevoir des tempêtes intenses plus tard dans l’année. Le spécialiste des ouragans Michael Lowry a tweeté que les températures de surface de la mer dans la principale région de développement de l’Atlantique, où se forment la plupart des ouragans américains de catégorie 3 ou plus, « sont aussi chaudes aujourd’hui à la mi-février qu’elles le sont généralement à la mi-juillet. Incroyable ».

Selon M. Hirschi, les températures de surface de la mer se trouvent en « territoire inconnu ». Il s’attend à ce que le mois de mars batte le record du mois d’août dernier de 0,1 à 0,2 °C. Le mois de mars est généralement la période la plus chaude de l’année pour les océans, car c’est la fin de l’été dans l’hémisphère sud, où se trouvent la plupart des grandes mers du monde.

Les pics de température étaient attendus, mais leur amplitude a surpris. Les climatologues étudient actuellement la manière d’attribuer un poids aux différentes causes de ces anomalies.

Un puissant El Niño a fait grimper les températures, mais Francesca Guglielmo, scientifique principale chez Copernicus, a fait remarquer qu’il ne s’agissait que d’un facteur de réchauffement parmi d’autres qui agissaient conjointement. Chaque tonne supplémentaire de dioxyde de carbone émise par l’humanité accroît la pression sur les océans. Dans certaines régions, la chaleur anormale a également été intensifiée par la faiblesse des alizés, la léthargie du jet stream, les fluctuations de la circulation dans l’Atlantique Nord et la réduction de la pollution par les aérosols, qui expose une plus grande partie de l’océan au soleil.

Katharine Hayhoe, scientifique en chef de The Nature Conservancy, a déclaré que l’incertitude quant à l’interaction des différents facteurs nous rappelle que nous ne comprenons pas tous les aspects de la manière dont le système terrestre complexe réagit à un forçage radiatif sans précédent. « Cela se produit à un rythme beaucoup plus rapide que tout ce qui a été documenté dans le passé », a-t-elle déclaré. « Il est beaucoup plus probable que nous sous-estimions l’impact de ces changements sur la société humaine que nous ne le surestimions. »

El Niño est en train de s’affaiblir, ce qui devrait faire baisser les températures dans le Pacifique équatorial à partir de la fin du printemps ou du début de l’été. Si l’Atlantique Nord reste chaud à ce moment-là, cela pourrait annoncer une activité cyclonique intense, a averti M. Hirschi.

Ces risques augmenteront chaque année si les émissions de carbone d’origine humaine ne sont pas réduites et si le déboisement n’est pas inversé. « Ralentir, arrêter ou inverser la trajectoire de réchauffement sur laquelle nous sommes engagés revient à changer le cap d’un supertanker. Les résultats ne sont pas immédiats, mais plus tôt nous agirons, plus il nous sera facile d’éviter les problèmes », a-t-il déclaré.



AMOC

Le système critique des courants de l’océan Atlantique montre des signes précoces d’effondrement, ce qui a incité les scientifiques à lancer un avertissement.

Laura Paddison

Traduction – deepl Josette – source : CNN

Selon un nouveau rapport, un système crucial de courants océaniques pourrait déjà être sur le point de s’effondrer, ce qui aurait des conséquences alarmantes sur l’élévation du niveau de la mer et sur le climat mondial, entraînant une chute spectaculaire des températures dans certaines régions et une hausse dans d’autres.

En utilisant des systèmes informatiques exceptionnellement complexes et coûteux, les scientifiques ont trouvé un nouveau moyen de détecter un signal d’alerte précoce pour l’effondrement de ces courants, selon l’étude publiée vendredi dans la revue Science Advances. Et comme la planète se réchauffe, il y a déjà des indications que la situation évolue dans cette direction.

La circulation méridienne de retournement de l’Atlantique (AMOC en anglais), dont fait partie le Gulf Stream, fonctionne comme un gigantesque tapis roulant mondial, transportant les eaux chaudes des tropiques vers l’Atlantique Nord, où l’eau se refroidit, devient plus salée et s’enfonce dans les profondeurs de l’océan, avant de se propager vers le sud.

Les courants transportent la chaleur et les nutriments vers différentes régions du globe et jouent un rôle essentiel dans le maintien d’un climat relativement doux dans de grandes parties de l’hémisphère nord.

Depuis des décennies, les scientifiques tirent la sonnette d’alarme quant à la stabilité de la circulation, car le changement climatique réchauffe les océans et fait fondre la glace, perturbant l’équilibre entre la chaleur et le sel qui détermine la force des courants.

Si de nombreux scientifiques pensent que l’AMOC ralentira sous l’effet du changement climatique, et pourrait même s’arrêter, il subsiste une grande incertitude quant au moment et à la vitesse à laquelle cela pourrait se produire. L’AMOC ne fait l’objet d’une surveillance continue que depuis 2004.

Les scientifiques savent, grâce à l’élaboration d’une image du passé à l’aide de carottes de glace et de sédiments océaniques, que l’AMOC s’est arrêtée il y a plus de 12 000 ans à la suite d’une fonte rapide des glaciers.

Aujourd’hui, ils s’efforcent de déterminer si cela pourrait se reproduire.

Cette nouvelle étude constitue une « avancée importante », a déclaré René van Westen, chercheur en sciences marines et atmosphériques à l’université d’Utrecht, aux Pays-Bas, et coauteur de l’étude.

Les scientifiques ont utilisé un superordinateur pour faire tourner des modèles climatiques complexes sur une période de trois mois, simulant une augmentation progressive de l’eau douce dans l’AMOC – représentant la fonte des glaces ainsi que les précipitations et le ruissellement des rivières, qui peuvent diluer la salinité de l’océan et affaiblir les courants.

En augmentant lentement la quantité d’eau douce dans le modèle, ils ont vu l’AMOC s’affaiblir progressivement jusqu’à ce qu’il s’effondre brusquement. C’est la première fois qu’un effondrement est détectable à l’aide de ces modèles complexes, ce qui constitue « une mauvaise nouvelle pour le système climatique et l’humanité », selon le rapport.

En revanche, l’étude ne donne pas de calendrier pour un éventuel effondrement. D’autres recherches sont nécessaires, a déclaré M. van Westen à CNN, notamment des modèles qui imitent également les effets du changement climatique, tels que l’augmentation des niveaux de pollution réchauffant la planète, ce qui n’était pas le cas dans cette étude.

« Mais nous pouvons au moins dire que nous nous dirigeons vers le point de basculement du changement climatique », a déclaré M. van Westen.

Les conséquences de l’effondrement de l’AMOC pourraient être catastrophiques. Selon l’étude, certaines régions d’Europe pourraient voir leurs températures chuter de 30 degrés Celsius en l’espace d’un siècle, ce qui donnerait lieu à un climat complètement différent en l’espace d’une ou deux décennies seulement.

« Aucune mesure d’adaptation réaliste ne peut faire face à des changements de température aussi rapides », écrivent les auteurs de l’étude.

Les pays de l’hémisphère sud, quant à eux, pourraient connaître un réchauffement accru, tandis que les saisons humides et sèches de l’Amazonie pourraient s’inverser, ce qui perturberait gravement l’écosystème.

L’effondrement de l’AMOC pourrait également entraîner une hausse du niveau des mers d’environ 1 mètre, a déclaré M. van Westen.

Stefan Rahmstorf, océanographe physique à l’université de Potsdam en Allemagne, qui n’a pas participé à l’étude, a déclaré qu’il s’agissait d’une « avancée majeure dans la science de la stabilité de l’AMOC ».

« Cela confirme que l’AMOC a un point de basculement au-delà duquel il s’effondre si l’océan Atlantique Nord est dilué avec de l’eau douce », a-t-il déclaré à CNN.

Les études précédentes qui ont permis de trouver le point de basculement de l’AMOC ont utilisé des modèles beaucoup plus simples, a-t-il ajouté, ce qui a donné à certains scientifiques l’espoir de ne pas trouver ce point de basculement avec des modèles plus complexes.

Cette étude anéantit ces espoirs, a déclaré M. Rahmstorf.

Joel Hirschi, responsable associé de la modélisation des systèmes marins au Centre national d’océanographie du Royaume-Uni, a déclaré que cette étude était la première à utiliser des modèles climatiques complexes pour montrer que l’AMOC peut basculer de « on » à « off » en réponse à des quantités relativement faibles d’eau douce entrant dans l’océan.

Mais il y a des raisons d’être prudent, a-t-il ajouté. Même si l’étude a utilisé un modèle complexe, sa résolution reste faible, ce qui signifie que la représentation de certaines parties des courants pourrait être limitée.

Cette étude vient s’ajouter au nombre croissant de preuves indiquant que l’AMOC pourrait s’approcher d’un point de basculement – et qu’il pourrait même être proche.

Une étude réalisée en 2021 a révélé que l’AMOC n’avait jamais été aussi faible au cours des 1 000 dernières années. Et un rapport particulièrement alarmant – et quelque peu controversé – publié en juillet de l’année dernière, a conclu que l’AMOC pourrait être en passe de s’effondrer dès 2025.

Pourtant, d’énormes incertitudes subsistent. Jeffrey Kargel, scientifique principal au Planetary Science Institute en Arizona, a déclaré qu’il pensait que la théorie d’un arrêt potentiellement imminent de l’AMOC « resterait quelque peu controversée jusqu’à ce que, un an plus tard, nous sachions que c’est bien le cas ».

Il a comparé son effondrement potentiel aux « folles fluctuations d’un marché boursier qui précèdent un grand krach » – il est presque impossible de déterminer quels changements sont réversibles et lesquels sont les signes avant-coureurs d’une catastrophe.

Les données modernes montrent que la force de l’AMOC fluctue, mais il n’y a pas encore de preuve observée d’un déclin, a déclaré M. Hirschi. « La question de savoir si des changements brusques de l’AMOC similaires à ceux observés dans le passé se produiront à mesure que notre climat continuera à se réchauffer est une question importante qui reste ouverte. »

Cette étude est une pièce du puzzle, a déclaré M. Rahmstorf. « Elle renforce considérablement l’inquiétude croissante concernant l’effondrement de l’AMOC dans un avenir relativement proche », a-t-il déclaré. « Nous ignorerons ce risque à nos risques et périls. »


Documentation : Obsant